Apprendre à s'aimer soi-même

Apprendre à s’aimer soi-même 

Oui, vous disais-je, la psychanalyse guérit ; elle guérit non seulement parce qu'elle parvient à supprimer les symptômes d’une maladie, et souvent la maladie elle-même, mais surtout parce qu’elle réussit à provoquer un changement profond de la personnalité du patient. En effet, la réussite la plus aboutie d’une analyse est de modifier l’attitude de l’analysant vis-à-vis de sa souffrance, vis-à-vis de lui-même et vis-à-vis des autres. 

Pour nous, psychanalystes, l’idéal suprême est que le patient souffre moins - cela va sans dire -, mais surtout qu’il souffre moins, durablement, parce qu'il aura appris à mieux connaître sa souffrance et surtout à mieux s’aimer lui-même. Vous voyez, c’est une affaire de connaissance mais aussi d’amour, de connaissance de soi et d’amour de soi. Je m’explique. Si le patient arrive à comprendre émotionnellement pourquoi il souffre, nous verrons sa souffrance s’alléger ; si, au contraire, il n’en veut rien savoir, se crispe et se retranche dans le confort d’un trouble auquel il s’est habitué, alors nous verrons sa souffrance s’aggraver. 

Quant à l’amour de soi, lorsqu’une analyse est pleinement efficace, elle amène le patient à changer sa vision de lui-même et à s’aimer différemment. L’analyse lui apprend à rentrer dans son monde intérieur et y découvrir une force insoupçonnée qui se lève en lui, le dépasse et le porte vers l’autre. Rentrer en soi, c’est y trouver la force d’agir hors de soi, c’est trouver l’envie d’aller vers l’autre. S’aimer soi-même à l’issue d’une analyse réussie n’est donc pas se complaire dans un stérile amour de soi, mais se sentir suffisamment sûr de soi pour ne plus avoir peur de l’autre. Quel autre ? Non pas l'autre qui nous est indifférent, mais celui qui compte pour nous. L’autre dont j’ai peur, est l’autre que j’aime. S'aimer soi-même en étant heureux d'être ce que l'on est, conduit à se débarrasser de cette peur nuisible, fréquente chez nos patients, la peur que l’autre soit une menace : si je l’aime, - dira le patient -, il va me quitter ; si je me livre, il va abuser de moi ; et si je m’approche, il va m’humilier. Cette peur insidieuse, si présente chez nos analysants, représente la plus oppressante prison imaginaire que seul un répétitif et inlassable retour sur soi, opéré maintes fois au cours de la cure, pourra abattre. 

J.-D. Nasio



11/01/2013
1 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 6 autres membres